Si l'histoire ne devait retenir qu'un
seul nom dans la légende du Karaté, ce serait bien
sûr celui de Gishin Funakoshi. Mais si l'on va un tout petit peu
plus loin, les spécialistes vous diront qu'avant lui il y a eu
Itosu et qu'après lui il y a eu Nakayama... Ce dernier est
né en avril 1913 au Japon dans la région de Yamagushi.
Son arbre généalogique le prédestinait aux Budo,
puisqu'il est un descendant direct d'une famille de Samouraïs.
Comme beaucoup, c'est par le Judo qu'il fait ses débuts dans les
Arts Martiaux, à l'âge de 10 ans. Son père lui
enseignera parallèlement le Kendo, la voie du sabre : une
tradition de famille.
Passionné par les langues, le jeune Masatoshi va intégrer
l'université de Takushoku ( Note aux habitués de notre
rubrique grand maîtres : encore elle ! )... C'est
là qu'il découvre le karaté : nous sommes en 1932.
Avec quelques autres étudiants, eux aussi formés à
d'autres Arts-Martiaux, Nakayama va apporter au karaté des
exercices inspirés des autres disciplines. Si l'enseignement du
karaté traditionnel consistait à répéter
inlassablement des katas et du Kihon, il lui manquait un travail
structuré au niveau de l'application des techniques. C'est donc
à cet époque qu'apparaissent les
Kihon Ippon kumité et tous les autres exercices de combat
conventionnels,
très vite suivis par les premiers exercices de combats libres...
En 1937, Nakayama va
s'exile en Chine où il passe 11 ans. Il
continue à enseigner et pratiquer le Karaté et
découvre les Arts Martiaux
locaux, en particulier le Taï Chi Chuan. Il ne rentre au Japon
qu'après la guerre, pour
accomplir l'oeuvre de sa vie en reprenant à son compte le
développement du Karaté. En effet, de nombreux experts
sont morts
à la guerre, le
dojo de Gishin Funakoshi a été détruit par les
bombardements
Américains : à cette époque, tout est à
reconstruire !...
En 1947, il crée la JKA (
Japan Karate Association ) dont Gishin Funakoshi est le
président d'honneur. Nakayama se révèle un
extraordinaire promoteur de la discipline, aussi doué pour
l'organisation que pour la formation d'experts. Tout cela ne se fait
pas sans heurts et il faut bien avouer que Funakoshi en personne ne
voit pas d'un très bon oeil la tournure sportive que donne
Masatoshi au Karaté-Do. Dès cette époque le plus
grand débat de l'histoire du Karaté ( pour ou contre le
Karaté Sportif ? ) fait rage et engendre une importante
scission. D'un côté Nishiyama qui veut défendre le
Karaté traditionnel, de l'autre Nakayama qui veut introduire le
combat libre et la compétition. Un débat qui n'est
toujours pas clos aujourd'hui !...
Au sein de la JKA, le plan de conquête du monde s'organise. Aux
côtés de Nakayama, les senseï Kanazawa, Enoeda,
Shiraï, Kase et Ochi ( entre autres ) vont développer le
Karaté sur le vieux continent, tandis que de son
côté, Nishiyama implante plus largement sa vision aux USA.
En 1957, peut de temps après le décès de Gishin
Funakoshi, Nakayama organise les premiers championnats du Japon. Ils
sont remportés par Kanazawa, et sont un énorme
succès populaire. La compétition se révèle
un formidable outil médiatique et contribue pour beaucoup au
succès du Karaté dans le monde occidental.
En 1987, à l'âge de 74 ans, Nakayama
s'éteint... Après avoir consacré sa vie à
la
mondialisation du Karaté, on peut dire de lui qu'il fut en
quelque sorte le père du Karaté sportif. La JKA existe
encore de nos jours et ses experts continuent à donner de
nombreux stages de part le monde. Hélas, de scissions en
querelles de personnes, celle-ci a quelque peu perdue de sa superbe et
n'est plus aussi rayonnante que par le passé. Elle compte encore
toutefois de nombreux experts remarquables, comme Kawasoe, Asaï,
Abe, Yahara et quelques autres, qu'il serait dommage de rater s'ils
passent en stage près de chez vous !...