Principaux titres : Champion du
monde en 1986 et 1988. Champion d'Europe en 1981, 1989 et 1990.
Postes de dirigeant : Expert
Fédéral, Entraîneur National combat,
directeur du Haut Niveau.
Né le 22 juillet 1959
à Lyon, Thierry Masci est sans doute l'homme qui
représente le mieux ce que devrait être un
karatéka. Lorsqu'il était compétiteur,
beaucoup le considéraient comme un véritable
Samouraï des temps modernes. Il serait vraiment
réducteur de réduire Masci à ses
exploits sur les différents tatamis de la planète
car son oeuvre dépasse largement sa propre personne. Il a
toujours été un homme au service des hommes et
méritait bien, dans notre rubrique grands champions, une
place tout à fait à part...
Thierry fait ses premiers pas dans les
Arts Martiaux en Judo, avant de découvrir le
Karaté, à l'âge de 15 ans. Travailleur
infatigable, il développe un très large
éventail de techniques, ne laissant rien de
côté, buvant toujours les paroles de ses
entraîneurs. Il obtient son premier podium national en 1976,
en prenant le titre de champion de France junior. Chez les senior, le
Lyonais va découvrir que les places sont chères.
A l'époque, la catégorie des mi-moyens
était particulièrement relevée dans
l'hexagone et Masci allait se tirer la bourre tout au long de sa
carrière avec d'autres excellents combattants, comme par
exemple Daniel Serfati et Bernard Bilicky.
Si bien que lorsqu'il arrive au niveau
international, Masci est déjà habitué
aux combats de très haut niveau. Il obtiens le titre
Européen des mi-moyens en 1981 et gagne deux
médailles de bronze aux championnats du monde, en 1980 et
1982, avant de réussir à grimper sur la plus
haute marche du podium, en 1986 à Sydney. Ce titre restera
aussi dans les annales du fait qu'il s'accompagne d'une belle histoire
d'amitié...
En effet, parmi les autres membres du groupe France,
Masci s'est épris d'amitié pour Jaques Tapol. Ce
dernier, d'un caractère plutôt solitaire et
renfermé, avait du mal à s'intégrer.
Un masque, cachant le coeur énorme et fragile, de celui que
tous considéraient comme un guerrier un peu
timbré. Masci et Tapol vont se préparer
ensembles, se lancer des défis dans la nature, se gonfler
mutuellement et partager une formidable aventure humaine. Lorsqu'ils
reviennent en stage avec les autres membres de l'équipe de
France, Francis Didier est obligé de calmer les ardeurs des
deux compères qui sont prêts à exploser
!
Masci
et Tapol entrent ensemble dans l'histoire !
L'image la plus forte de la
carrière de compétiteur de Thierry Masci est la
même que celle de Jaques Tapol : Lorsque le premier remporte
son titre, il ne saute pas au plafond, il reste digne et sobre pour
très sérieusement se diriger vers le second.
Masci donne ses gants à Tapol pour lui porter chance et lui
dit : "Maintenant c'est à toi de jouer...". A Sydney , une
paire de gants a été sacrée deux fois
championne du monde !
Mais si Tapol a choisit par la suite de
se retirer du circuit, Masci décide de continuer le chemin.
En 1988, au Caire, Thierry réussit l'incroyable exploit de
conserver son titre mondial. Personne n'a pour l'instant fait mieux
dans le karaté Français puisque seul Gilles
Cherdieu a réussi à faire de même ainsi
que Sophie Berger et Catherine Belrhiti chez les filles. Le titre de 88
fut somptueux, et le combat Thierry Masci / Wayne Otto restera comme
l'un des grands moments de l'histoire des Championnats du monde..
Cette article ne serait pas complet si
on occultait une autre facette de ce champion d'exception. Car si Masci
agit en Samouraï sur les Tatamis, c'est qu'il l'est aussi dans
la vie. Le Lyonais fait en effet partie du G.I.P.N., groupe
d'intervention de la police nationale. En Février 86, il
fait la une de l'actualité, après avoir
réussit un exceptionnel sauvetage dont voici le
récit. Un forcené est entré dans un
hôpital, en tirant deux balles sur le gardien. Il s'est
ensuite enfermé dans une chambre, en faisant trois otages :
une infirmière, une mère et son
bébé de quelques jours. Le G.I.P.N. est
appelé et Thierry Masci se porte volontaire pour tenter
quelque chose. Il se déguise en docteur, frappe à
la porte et demande s'il peut rentrer pour s'assurer que le
bébé va bien... Pendant plus de deux heures, il
va discuter avec le preneur d'otages. Celui-ci d'abord
hystérique se calme peu à peu. Au bout du compte,
il rend son arme. Avant de se livrer à la police, il serre
la main du policier et lui dit "Merci docteur"... Pendant tout se
temps, un tireur d'élite attendait un signe de Masci pour
faire feu, mais ce dernier aura réussi à
éviter le pire. Il s'en suivra une véritable cure
de jouvence pour le karaté ! Pour une fois, les
médias s'intéressent au côté
self control, psychologie, gestion du stress, maîtrise de
soi, voilà que notre art dépasse le simple cadre
des gestes violents...
Quel défis Masci pouvait-il se lancer
après cela ? Le Lyonais allait s'en lancer deux : changer de
formule de combat pour passer au Ippon Shobu et obtenir un titre par
équipes ! C'est ainsi que notre champion prend le titre
Européen en Ippon Shobu en 1989 et 1990. Hélas,
l'aventure mondiale ne sera pas au rendez-vous... Lors de la
compétition par équipe Masci donne tout, il est
au sommet de son art et tout y passe : balayages spectaculaires,
contres en poings, Mae-Geris... Ceux qui en doutaient encore sont bien
obligés de l'admettre : Masci est le combattant le plus
complet de sa génération et malgré son
faible gabarit, c'est lui le meilleur. Le Français sort
invaincu de l'épreuve et aura vraiment donné
l'impression d'être invincible. Hélas, cette
dynamique ne se transmet pas à ses partenaires comme elle
était passée, quelques années plus
tôt, avec Tapol.
Le
Samouraï de l'an 2000
Ses coéquipiers sont
en-dedans, certains se préservent pour les individuels,
d'autres sont étonnamment transparents et la France ne passe
pas... La déception est d'autant plus grande qu'en se
donnant sans compter, Masci s'est blessé et
considérablement affaibli. Il tombe malade et ne peut
défendre ses chances dans l'épreuve
individuelle...
Tout au long de sa carrière,
Masci est resté fidèle à Francis
Didier, il choisit donc fort logiquement de rester à ses
côtés et entre dans l'encadrement de
l'équipe de France. Entraîneur National, Masci va
terminer le travail commencé lorsqu'il était
compétiteur et permettre à la France de retrouver
le sacre mondial en 1994 !... Il s'en suit une décennie de
domination tricolore, qui s'achève à Madrid dans
des circonstances rocambolesques... Masci se voit suspendu de ses
fonctions par la fédération mondiale pour mauvais
comportement : le comble de l'homme irréprochable ! Tandis
que Petinella, dans une rage folle envoyait dinguer ses dossiers et sa
chaise, Masci s'est contenté, le lendemain lorsque les
Français se sont imposés en individuels de lancer
la mini - ola des supporters Français. Une simple farce pour
dire que les bleus étaient toujours vivants, rien de
méchant. Le problème est évidemment
ailleurs, Masci était l'homme à abattre ! Trop
noble dans la défaite, trop incorruptible, trop fort, c'est
la preuve que ce sage au coeur d'enfant dérange.
Heureusement, ce n'est pas cette injustice qui lui fera perdre la
foi... La France a besoin de lui, le karaté aussi. Il est
notre plus bel exemple, le guide exemplaire qui nous rappelle
à tous ce que doit être un champion de
karaté !